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Santé publique, biodiversité et développement sont les thèmes abordés lors des Journées européennes du développement

posté 30th juin 2021 par Yacine Djibo

Les Journées européennes du développement (JED), principal forum européen pour la coopération internationale et le développement, ont eu lieu les 15 et 16 juin 2021. La manifestation virtuelle s’appuyait sur une plateforme en ligne conçue pour aider les participants à interagir directement avec leurs pairs et les principaux acteurs, et à rapporter témoignages et discussions. « Le Pacte vert pour un avenir durable », thématique choisie cette année, visait à explorer la dimension mondiale du plan de croissance économique durable de l’UE qui aspire à protéger les écosystèmes et promouvoir un développement durable sur le plan économique, environnemental et social.

C’est dans ce contexte que Speak Up Africa, en partenariat avec Target Malaria, l’Ifakara Health Institute, Imperial College London et Malaria No More, a co-organisé une session intitulée « When biodiversity meets public health: controlling diseases vectors » (Au carrefour de la biodiversité et de la santé publique : la lutte contre les vecteurs de maladies). Cette table ronde était axée sur le potentiel de l’impulsion génétique en tant que solution basée sur la nature pour lutter contre les maladies vectorielles, au carrefour des considérations de santé publique et de biodiversité.

“When biodiversity meets public health: controlling diseases vectors” – Panel Discussion

La session était animée par le Dr. Piero Genovesi, Président de l’IUCN SSC Invasive Species Specialist Group (Groupe spécialiste des espèces invasives de la Commission pour la survie des espèces de l’IUCN), et je faisais partie d’un groupe d’orateurs diversifiés dont Dr. Brian Tarimo, chercheur scientifique à l’Ifakara Health Institute basé en Tanzanie et Dr. Talya Hackett, chercheure post-doctorante à l’université d’Oxford, Royaume-Uni.

Pendant la session, Dr. Tarimo a indiqué que des interventions novatrices et complémentaires pour la lutte antipaludique, telles que l’utilisation de moustiques à impulsion génétique, pourraient être cruciales afin de ne pas perdre de terrain et de continuer à progresser dans la lutte contre le paludisme. Il a suggéré que nous ne pouvions pas continuer comme si de rien n’était et nous attendre à une évolution significative des statistiques. Dr. Tarimo a également souligné qu’il importait que les membres des communautés affectées par la recherche sur l’impulsion génétique soient impliqués dans le développement de la technologie ; de façon cruciale, ils doivent être informés et comprendre d’emblée en quoi consistent les travaux de recherche engagés.

Dr. Hackett s’est dite convaincue que déterminer le rôle écologique du moustique responsable de la transmission du paludisme était fondamental afin d’anticiper les conséquences de la suppression de ses populations dans le cadre des efforts d’élimination du paludisme. Elle a ensuite expliqué que les fluctuations interviennent couramment au sein des écosystèmes et que bien que la nature soit capable d’adaptation pour compenser d’éventuels changements, des travaux de recherche minutieux permettent de déterminer quels seraient les impacts possibles à long terme des interventions humaines sur l’environnement. Elle travaille actuellement sur un projet unique en son genre, en partenariat avec les équipes Target Malaria à l’Université du Ghana, pour déterminer quel est le rôle du moustique Anopheles Gambiae dans la pollinisation et la chaîne alimentaire. Cela permettra d’anticiper l’impact possible sur les écosystèmes locaux de la réduction des populations de cette espèce du fait du recours aux approches à impulsion génétique pour la lutte anti-vectorielle.

En ce qui concerne les approches novatrices de la lutte anti-paludisme, je crois au rôle fondamental de l’engagement des parties prenantes et de la participation des communautés les plus affectées par la maladie. Il est crucial que nous entamions un dialogue avec les principaux chercheurs et scientifiques qui travaillent au développement de nouveaux outils pour la lutte anti-vectorielle afin de convertir leur savoir en notions qui soient faciles à appréhender par toute la communauté. De même, il est essentiel que les scientifiques qui vivent dans des communautés affectées par le paludisme fassent entendre leur voix et participent aux discussions sur les approches novatrices possibles, car ils possèdent un savoir inestimable découlant de leur réalité sur place.

En considérant les maladies vectorielles dans le contexte des écosystèmes, il ne faut pas oublier que les changements climatiques augmentent directement les risques de transmission du paludisme ; il convient donc de lutter en parallèle contre ces deux problèmes. D’ici 2050, on prévoit que les changements climatiques à eux seuls pourraient exposer certains pays en Amérique du Sud, en Afrique subsaharienne et en Chine à une hausse de 15 % de la probabilité de transmission du paludisme. Les organisations de la société civile ont un rôle important à jouer pour stimuler les actions et demander des comptes aux dirigeants, car elles ont des perspectives uniques qui font d’elles les meilleures défenseures des communautés les plus impactées.

Enfin, nous ne devons pas oublier l’immense fardeau économique que représentent les maladies vectorielles. Selon des estimations récentes, le paludisme serait responsable de pertes totalisant 12 milliards de dollars en Afrique ; pour ce qui concerne la dengue, cela équivaudrait à 3 milliards de dollars de pertes en Amérique latine. Dans nos efforts pour reconstruire nos économies et piloter l’ordre du jour du développement, parlons encore de collaborations possibles afin de mettre un terme aux pertes humaines et économiques qui sont imputables aux maladies vectorielles.