Conclusions du premier lâcher de moustiques génétiquement modifiés sans impulsion génétique en Afrique
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Le 1er juillet 2019, Target Malaria, en collaboration avec l’Institut de Recherche en Sciences de la Santé (IRSS) a procédé à la dissémination à petite échelle de moustiques mâles stériles génétiquement modifiés sans impulsion génétique dans le village de Bana, au Burkina Faso.
Ce lâcher à petite échelle était le premier jamais réalisé en Afrique et a marqué une étape importante pour Target Malaria et pour la recherche sur la lutte antivectorielle. Il nous a permis de travailler en étroite collaboration avec les parties prenantes et les autorités réglementaires et nous a fourni beaucoup d’informations sur le comportement des moustiques modifiés sur le terrain. Il s’agissait également d’une opportunité de renforcer les capacités de toute l’équipe à importer, élever, transporter, relâcher et surveiller les moustiques génétiquement modifiés sans impulsion génétique.
L’Agence Nationale de Biosécurité (ANB), qui est l’autorité nationale compétente pour la réglementation en matière de biotechnologie et de biosécurité, a autorisé le projet à importer d’abord des œufs de moustiques génétiquement modifiés de l’institution partenaire Polo d’Innovazione di Genomica, Genetica e Biologia (PoloGGB) en Italie, puis à lâcher ces moustiques dans la nature. Après des années d’engagement et de dialogue continu entre le projet et les membres du village, la communauté de Bana a donné son accord pour que le lâcher ait lieu sur ses terres.
Dans le cadre d’une étude comparative, l’équipe de Target Malaria à l’IRSS a lâché environ 6 400 moustiques mâles stériles génétiquement modifiés sans impulsion génétique de l’espèce Anopheles gambiae et environ 8 500 moustiques non modifiés. Nous avons ensuite utilisé la technique de Marquage, Lâcher, Recapture pour les suivre.
Il est important de noter que ce lâcher n’aura aucun impact sur la densité des moustiques vecteurs du paludisme ni sur la transmission du paludisme à Bana ou au Burkina Faso. Comme les moustiques lâchés sont mâles et stériles, ils ne piquent pas et ils mourront sans avoir de progéniture. L’objectif de la libération n’était pas encore de tester un potentiel outil de contrôle vectoriel. Les moustiques mâles stériles sont génétiquement modifiés, mais ne portent pas l’impulsion génétique qui biaise l’héritage.
Après sept mois de surveillance post-lâcher, notre équipe a pu recueillir des informations essentielles :
- Des moustiques mâles stériles non génétiques ont été recapturés dans des essaims, ce qui montre qu’ils peuvent participer à des activités d’essaimage (importantes pour la reproduction) de la même manière que les moustiques sauvages. Des moustiques mâles non modifiés ont également été recapturés ainsi que des moustiques mâles de type sauvage.
- Des moustiques mâles stériles sans impulsion génétique ont été recapturés à l’intérieur des habitations, ce qui montre que, comme les mâles sauvages, ils préfèrent parfois s’abriter à l’intérieur des maisons.
- Les moustiques mâles stériles sans impulsion génétique ne se sont pas dispersés au-delà des limites du village de dissémination et étaient comparativement moins mobiles que les moustiques disséminés de type sauvage.
- La survie des insectes libérés a également été estimée. Les moustiques mâles stériles n’ont pas survécu aussi longtemps que leurs homologues non modifiés relâchés.
- Après la période de recapture quotidienne de 20 jours du processus de marquage, lâcher, recapture (MLR), une surveillance mensuelle régulière assistée par des analyses moléculaires s’est poursuivie pendant un total de sept mois et, comme prévu, aucun moustique génétiquement modifié n’a été détecté au cours de cette période.
- Le lâcher, l’étude MLR et les activités de surveillance se sont tous déroulés comme prévu. Toutes les étapes menant au lâcher, y compris le transport et le lâcher en lui-même, ont été menées en présence d’observateurs de l’ANB qui ont également vérifié tous les protocoles. Les obligations de déclaration sont maintenant finalisées.
Un rapport contenant tous les résultats et les leçons apprises du lâcher et des mois de surveillance a été compilé et soumis à l’ANB. L’équipe d’engagement des parties prenantes a passé les derniers mois à informer les communautés touchées et les autres parties prenantes des résultats et des leçons tirées de l’étude.
Pour obtenir de plus amples informations sur le lâcher et ses résultats : Résultats du lâcher à petite échelle de moustiques mâles stériles génétiquement modifiés sans impulsion génétique au Burkina Faso
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Target Malaria Burkina Faso est fier d’avoir mené à bien le premier lâcher de moustiques génétiquement modifiés sans impulsion génétique en Afrique et d’avoir assuré le suivi du lâcher en 2019 et 2020. Il s’agit d’un moment historique pour le Burkina Faso et d’un jalon important pour le projet. Le projet a encore beaucoup de chemin à parcourir, mais ces résultats renforcent notre détermination et notre engagement.
Nous travaillons maintenant sur la demande d’autorisation d’importation d’un autre moustique génétiquement modifié sans impulsion génétique que nous appelons le mâle biaisé . Ce moustique ne porte pas non plus d’ impulsion génétique qui biaise son héritage. Il est modifié de sorte que sa progéniture soit majoritairement mâle. Il n’aura aucun impact sur le paludisme. Nous ne libérerons pas d’autres moustiques génétiquement modifiés en 2021.
À long terme, notre objectif est de développer et de partager un moustique génétiquement modifié avec la technologie d’impulsion génétique qui permettra à la modification de persister parmi la population de moustiques vecteurs du paludisme pendant plusieurs générations. Seul ce type de moustique serait en mesure de lutter contre le paludisme.
Bien que les résultats obtenus jusqu’à présent soient prometteurs, il faudra des années de recherche avant que nous disposions d’un moustique à impulsion génétique qui puisse être utilisé dans la lutte contre le paludisme. Nous n’avons pas l’intention de libérer un moustique à impulsion génétique au Burkina Faso dans un avenir proche.
Target Malaria utilise une approche prudente et progressive afin de co-développer et de partager une technologie durable, rentable et à long terme pour lutter contre le paludisme. Nous sommes fiers que le Burkina Faso soit à l’avant-garde de cette recherche novatrice de pointe.