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Résistance aux médicaments antipaludiques : une course sans fin

posté 5th octobre 2022 par Dr Florian Noulin

La récente publication des résultats prometteurs d’un vaccin antipaludique (R21/Matrix-M) montrant une bonne efficacité (78% de protection) après un essai clinique de phase 2b a été chaleureusement accueillie par la communauté scientifique, ainsi que les communautés menacées.

Le paludisme est une maladie évitable qui reste mortelle avec plus de 600 000 décès annuels, dont 96% ont lieu en Afrique parmi des enfants de moins de cinq ans. Pendant très longtemps, les traitements reposaient presque exclusivement sur les médicaments antipaludiques. En raison de la capacité du parasite plasmodium à s’adapter aux médicaments, les scientifiques se sont lancés dans une course permanente pour garder une longueur d’avance sur le parasite.

Pendant longtemps, la chloroquine a été le principal médicament antipaludique mais depuis l’apparition de souches résistantes à la chloroquine dans les années 1950, la résistance s’est propagée rapidement entraînant une baisse d’efficacité et d’utilisation.

L’artémisinine est désormais la première ligne de traitement. Ce composé est dérivé d’une plante (artemisia annua) et a valu à son découvreur (Professeure Tu Youyou) le prix Nobel de médecine en 2015. Ce médicament est souvent utilisé en association avec d’autres médicaments (l’artésunate, la sulfadoxine) car il est rapidement éliminé par le corps. Il peut ainsi tuer les parasites à un rythme rapide avant qu’un autre médicament de longue durée ne mette fin au processus. Ces combinaisons sont connues sous le nom de thérapies combinées à base d’artémisinine (TCA). Jusqu’à présent, cinq d’entre elles sont en service. Cette forme de médicament est préférée à l’utilisation de l’artémisinine seule pour éviter le développement de résistances.

Malheureusement, des premiers signalements de résistance à l’artémisinine ont été décrits en Asie du Sud en 2018. Si le mécanisme n’est pas encore entièrement compris, une mutation du gène plasmodium Kelch 13 semble être fortement corrélée à cette résistance.

La présence de souches résistantes à l’artémisinine en Afrique fait encore débat. Des rapports font état de sa présence en Ouganda. Notamment, l’artémisinine élimine toujours le parasite mais à un rythme plus lent qu’il ne devrait l’être, ouvrant la voie à une future résistance.

L’apparition de cette résistance a longtemps été redoutée et la communauté scientifique travaillait déjà sur des TCA supplémentaires (actuellement cinq sont en développement). D’autres programmes de développement de médicaments antipaludiques sont en cours. Néanmoins, la route est encore longue pour obtenir le prochain médicament qui remplacera l’artémisinine et ses dérivés comme traitement de première ligne.

Ce phénomène de résistance met en évidence le fait que pour lutter contre le paludisme, une approche multifactorielle est nécessaire. Le développement de vaccins, les traitements médicamenteux et les stratégies de lutte antivectorielle sont des solutions complémentaires à un même problème : combattre et en finir avec le paludisme.